Dans un pays en proie à une insécurité galopante, toute démarche visant à renforcer la Police Nationale d’Haïti (PNH) devrait être empreinte de rigueur, de transparence et surtout d’urgence. Or, les dernières révélations concernant l’achat d’équipements pour la PNH révèlent une gestion confuse, voire douteuse, de ressources déjà limitées.
Le lundi 21 avril, le gouvernement haïtien a transféré 70% du montant demandé au concessionnaire pour l’achat d’équipements pour la PNH. A première vue, cette action démontre une volonté d’agir. Mais derrière cet effort partiel se cache une réalité beaucoup plus inquiétante. La demande d’achat de ce matériel avait été soumise au Ministère de la Justice en décembre 2024. Près de cinq mois plus tard, alors que l’insécurité continue de sévir dans le pays, le matériel n’a toujours pas été livré. Pourquoi cela n’a-t-il pas eu lieu ? Parce que l’entreprise exige logiquement le paiement intégral avant toute livraison.
Le gouvernement haïtien est-il vraiment sérieux dans sa guerre contre les bandes armées ? Rien n’est moins sûr. Selon les documents en possession de Métronome, les fonds que le gouvernement prétend avoir injectés dans la PNH n’ont pas tous été utilisés aux fins annoncées. Une partie a servi à payer des primes à des policiers impliqués dans des opérations, l’autre à entretenir les véhicules de l’institution. Pire encore, à plusieurs reprises, ces dépenses sont arrivées en retard. Pour l’opération de Mirebalais, par exemple, aucun centime n’a encore été versé, selon une source proche du dossier.
Comment voulez-vous que la police se mobilise efficacement dans ces conditions ? Comment croire à la sincérité d’une politique de sécurité lorsque les promesses budgétaires ne se traduisent pas par des actions concrètes ? L’achat d’équipements pour une institution aussi stratégique que la PNH ne peut se faire au coup par coup. Il en va de la vie de millions de citoyens pris en otage par la violence.
Dans ce contexte, le silence ou l’absence de justification claire de la part des autorités est en soi suspect. Il ne suffit pas d’annoncer que des millions sont dépensés pour la sécurité. Il faut prouver que ces fonds sont utilisés de manière efficace, rapide et honnête. Sinon, la méfiance à l’égard des institutions ne fera que croître, et avec elle l’impression que l’État lui-même est à la traîne dans la défense du pays.