A l’approche du 18 mai, date symbolique pour la nation haïtienne, près de 400 millions de gourdes ont été affectées aux festivités officielles. Dans un pays ravagé par la violence, la faim, les déplacements massifs de population et la faillite de l’Etat, cette décision a fait l’effet d’un choc. Concerts, décorations, frais de déplacement, logistique, hébergement des officiels, sonorisation, sécurité de l’événement… tout est prévu, sauf l’essentiel : la survie de la population.
Dans de nombreuses régions du pays, cette dépense est perçue comme une insulte à la détresse ambiante. Alors que les familles dorment sous des tentes de fortune, que les balles sifflent dans la capitale et que les enfants fuient les écoles transformées en camps de réfugiés, l’État préfère organiser des parades et allumer des feux d’artifice. A quoi bon célébrer le drapeau quand la nation qu’il représente s’effondre ?
Les critiques dénoncent une manœuvre politique déguisée en patriotisme. Faute de pouvoir gouverner efficacement, le CPT cherche à se rendre visible à travers un événement symbolique. Mais ce symbole sonne creux. Au lieu de renforcer la PNH, d’améliorer les conditions de vie des déplacés ou de garantir un minimum de protection à la population, l’équipe au pouvoir choisit de faire la fête, comme si la souffrance collective n’existait pas.
Ces dépenses inutiles témoignent d’un profond mépris des priorités nationales. 400 millions de gourdes auraient pu financer des abris d’urgence, des repas collectifs, des médicaments, du carburant pour les hôpitaux ou des équipements pour les forces de l’ordre. Mais non. Les discours, les podiums, les artistes invités et les billets d’avion des officiels sont choisis.
Le peuple n’a pas besoin d’un spectacle, il a besoin d’un État. Un État qui protège, qui s’occupe et qui écoute. Pas un État qui parade sur les ruines de la République. Tant que le CPT continuera à dilapider les ressources publiques dans l’indifférence totale à la douleur collective, il perdra le peu de légitimité qui lui reste. Et le drapeau flottera sur un pays abandonné.